Education juive et féminisme[1]

Education juive et féminisme[1]

Initiation au vécu messianique

Avant-propos
 

« Il est temps enfin de laisser la parole à rabbi Akiba et à rabbi Tarphon[2] si on tient à être Juif, c’est-à-dire à se réclamer d’eux » – écrit Lévinas[3]. On ne saurait mieux dire, car en matière d’éducation, précisément, les textes talmudiques sont empreints d’une surprenante singularité.

D’une portée universelle, le concept d’éducation répond à la finalité sociétale de toute civilisation, de tout peuple ou culture, quel que soit leur degré de développement. Certes, les valeurs à transmettre diffèreront en vertu du caractère identitaire des uns et des autres, mais substantiellement, éduquer reflétera toujours une volonté d’œuvrer à l’épanouissement des générations futures tout en assurant la continuité des éthiques qu’il convient d’observer.

L’éducation juive souscrit-elle à ces critères ? Bien évidemment. Et cependant, certains textes talmudiques étonnent.
 

L’homme a l’obligation d’éduquer son fils dans l’observation des Mitsvoth, la femme n’a point le devoir d’éduquer son fils, [l’homme] se doit d’éduquer son fils et non sa fille[4].

Ainsi, selon l’avis de rabbi Chimone ben Lakiche, la Mitsvah [précepte] d’éduquer concernerait donc uniquement père et fils, la mère étant exempte de toute charge d’éducation, qu’il s’agisse de son fils ou de sa fille. Certes, les avis des décisionnaires sont partagés quant à la portée de cet énoncé : est-il d’application ou au contraire s’agit-il d’une opinion non avalisée par la Halakha ? Mais quand bien même il soit généralement admis qu’en matière d’éducation, hommes et femmes partagent in fine la même obligation, l’existence d’une telle discussion est un improbable défi au bon sens. Comment concevoir que la mère ne participe point au développement de ses enfants et que les filles soient mises à l’écart des acquis aussi fondamentaux que ceux du ‘Hinoukh ? Ordonnance qui de surcroît est en flagrante contradiction avec cet autre texte talmudique stipulant : « A celui qui guide ses fils et ses filles dans le droit chemin, s’applique le verset[5] – « Tu connaîtras un havre de plénitude »[6]. On l’aura noté, fils et filles, sans distinction.

Car d’évidence – écrit Rabbi Yechaiah Horowitz, les femmes ont le devoir de chapitrer les fils bien plus que les pères, et ceci pour la bonne raison que, plongés dans leurs études ou absents pour de causes professionnelles, ceux-ci ne sont pas à même de veiller au bien-être de leurs enfants[7]. Pareillement, le Talmud se fait l’écho de la reine Bath-Cheva sermonnant son fils Salomon à propos de son mode de vie trop hédoniste[8]. D’où la recommandation – observe Rabbi Yts’hak Abouhav, de choisir une épouse avisée et vertueuse apte à guider les fils dans le droit chemin, mission – ainsi que nous l’apprend Bath-Cheva, lui incombe davantage qu’à son mari[9].

Guider dans le droit chemin, ne serait-ce point éduquer ? Comment, dès lors, comprendre que ces principes puissent être l’objet de discussions au point que selon certains, le ‘Hinoukh soit masculin uniquement ?  

Y répondre signifie aborder les grands thèmes de l’enseignement juif, en l’occurrence, celui du libre arbitre, celui de l’essentialité masculine et féminine, et enfin, celui de l’idéal messianique ontologiquement lié à l’identité juive.

Chapitre I : Le ‘Hinoukh

1. Le concept ‘Hinoukh dans les Ecritures

Dans les Ecritures, le concept ‘Hinoukh est généralement associé aux objets tels que l’autel[10], l’habitat[11], le Temple[12], les murs de Jérusalem[13], alors qu’envers une personne, il n’est mentionné que deux fois, chez Abraham duquel il est dit qu’il « arma les apprentis de sa maison »[14] et dans Proverbes (22, 6) « Eduque l’adolescent selon son cheminement ». D’où le commentaire de Rachi selon lequel le mot ‘Hinoukh, qu’il soit appliqué aux choses ou à l’homme, renferme l’idée de l’initiale mise en usage à la fonction qui leur est propre, concept qui en français – explicite Rachi, est celui d’« initier »[15].

Compte tenu que dans l’ancien français, « inition » signifie « commencement », on peut considérer que selon l’explication de Rachi, le mot « ‘Hinoukh » prend l’entendement d’inauguration et de consécration, d’une affectation à une fin déterminée et parfois exclusive. « ‘Hinoukh doit se comprendre en termes de commencement » – écrit Rachi ailleurs[16], commentaire lapidaire qui corrobore celui développé ici. Parallèlement, la racine « ‘hnkh » dans le Talmud compose les mots signifiant « cavité buccale » et « sobriquet », traçant tous deux des confins définis ou réducteur. De même, ‘Hinoukh – dans son acceptation de commencement, entend consacrer l’éclosion du jeune en l’affectant à une fin exclusive, en l’occurrence, à celle consistant à véhiculer l’idéal messianique dont il est porteur. Ce qui signifie qu’il y a ‘Hinoukh et il y a ‘Hinoukh.

Le ‘Hinoukh dont il sera question dans ce présent article concerne l’initiation au vécu messianique, notion sans rapport avec l’éducation au sens large et habituel du terme, celui d’épanouir les jeunes, de les guider dans le droit chemin et de leur transmettre les valeurs qui sont les nôtres, aspects qui englobent d’égales façon parents et enfants tous sexes confondus.
 

  Initier au vécu messianique, quelle en est la signification ?

  1. Chaussure à son pied d’après le Talmud

Appréhender le concept ‘Hinoukh au sens messianique du terme, nous oblige à revisiter l’aube de l’humanité, et plus particulièrement, le récit de la Genèse ayant trait au personnage mythique de ‘Hanokh [Enoch] duquel la Torah dit et répète qu’il « suivit l’Eternel »[17]. Et comme cette locution n’est réservée qu’aux justes parmi les justes, un enseignement fort ancien nous fait part de la raison d’être de cette éminence : cordonnier, ‘Hanokh transforma cet artisanat en vocation divine, chaque point de couture étant prétexte à célébrer la Gloire de Dieu[18]. Or – enseigne le Maharal, l’enseignement juif ne s’attache qu’à l’essentialité de toute chose, à leur réalité intrinsèque et non à l’évènementiel[19], et donc, il y a lieu d’exclure la représentation d’un ‘Hanokh forgeron, menuisier ou que sais-je encore. Le nom propre ‘Hanokh comporte les mêmes caractères que le substantif ‘Hinoukh [Education], et en parlant de ‘Hanokh cordonnier, il y a volonté d’établir une corrélation entre éduquer et chausser. Ce qui nous invite à s’interroger sur le rôle de la chaussure dans le Talmud.   

Parmi les bénédictions récitées dès le lever, on retrouve celle – « Béni soit Dieu qui pourvoit à tous mes besoins », action de grâce qui célèbre le fait d’avoir chaussure à son pied – dit le Talmud[20]. « Tous mes besoins » se rapportant aux seules chaussures?! Ne serait-ce point quelque peu outrancier ? Apparemment non puisque, conformément aux Ecritures enjoignant d’éviter d’aller pieds nus[21], ce même Talmud préconise d’acquérir des chaussures, fut-ce, si nécessaire, au prix de la vente de son habitat[22]! Pourquoi cette démesure ?

D’autre part, les Ecritures se font l’écho de suppliques pour le moins étonnantes : « Protège les pieds de tes bien-aimés »[23], « Il [Dieu] préservera ton pied de toute embûche »[24], « Ils [les anges] te porteront sur les mains de peur que ton pied ne heurte une pierre »[25]. Invoquer la protection divine pour les… pieds !? Certes, au sens large du terme, c’est de « pas » qu’il s’agit, de démarches pour lesquelles l’homme invoque l’aide du Créateur. Toutefois, les Ecritures ne peuvent être dissociées de leur sens obvie – observe le Talmud[26], et dans leur littéralité, c’est bien de « pied » dont il est question, ce qui nous ramène à l’interrogation initiale : quel en est le signifié ? Préoccupation triviale ? En réalité, ce sujet aborde un des grands thèmes de l’enseignement juif : celui du libre arbitre.

2. Le libre arbitre d’après l’enseignement juif

En guise de préambule, ce texte du Talmud stipulant qu’au cours des diverses phases conduisant à la création l’homme, Dieu campa Adam « debout sur ses pieds »[27]. Ici encore, les commentaires incontournables du Maharal.

L’échine courbée est de règle dans le monde animal, et en décrivant Dieu imposant à Adam la posture verticale, les Rabbins du Talmud posent avec acuité l’essentialité de la dimension humaine. Souveraineté de l’homme face à la Souveraineté de Dieu, libre d’agir selon sa volonté car semblable à son Créateur[28], tel est donc l’Adam « debout sur ses pieds » Et pourtant, la place attribuée par l’enseignement juif au libre arbitre est empreinte d’une rare complexité.

Déjà, l’identité juive n’est d’aucune façon tributaire d’une autodétermination, puisque rabbin ou cardinal, juif il est et juif il restera – dit le Talmud[29]. Irrémissibilité de l’Être Juif – écrit à ce propos Lévinas[30]. Pareillement, la Torah fut transmise de manière coercitive puisque Dieu renversa le mont Sinaï comme une voûte au-dessus du peuple juif et leur dit : « Si vous acceptez la Torah, très bien, sinon, ce sera là votre sépulture »[31]. Et envers celui qui, trop complaisamment, se satisfait des acquis de ses études, les Maîtres du Talmud, eux, se montrent bien moins accommodants : ne t’attribue aucun crédit puisque c’est pour cela que tu as été créé – lui disent-ils[32]. Si donc le libre arbitre est l’expression de la souveraineté de l’homme, force nous est de constater que la condition juive en prend bien peu acte !

Aussi, ce commentaire extrêmement pointu de Na’hmanide dont le point axial est le verset suivant :
 

«Et l’Eternel, ton Dieu, circoncira ton cœur et celui de ta postérité pour que tu aimes l’Eternel, ton Dieu, de tout ton cœur et de tout ton âme, afin que tu vives[33].
 

 Cette « circoncision » du cœur qui concerne les temps futurs, est décrite par Na’hmanide en ces termes :
 

 Depuis la Création, l’homme a la liberté d’agir selon sa volonté, d’être juste ou malfaisant, et ceci jusqu’aux temps futurs, afin qu’il soit rétribué lorsqu’il choisit le bien et puni en cas de volonté de faire le mal. Mais dans le futur messianique, le choix du bien lui sera naturel et son cœur n’aura de désir pour ce qu’est indigne, comportement dont l’expression « circoncision » ici mentionnée se fait l’écho…

C’est le sens de la prophétie d’Ezéchiel « Je vous doterai un cœur nouveau et un esprit nouveau »[34]… car le futur messianique exclut toute notion de mérite puisque, naturellement, l’homme accomplira ce qui est digne sans aucune autre inclination ; or, il n’y a de mérite en l’absence d’autres inclinations.
 

Ce commentaire est fondamental à plus d’un titre. En tout premier lieu, il remet en cause une notion universellement acceptée, celle stipulant que le libre arbitre est intrinsèque à la dignité de l’homme. En quoi l’être humain serait-il estimable, argue-t-on, s’il se trouverait dans l’incapacité de se déterminer volontairement par ses actes? Or selon le commentaire de Na’hmanide dont les racines plongent au cœur de l’enseignement juif[35], le principe de libre arbitre ne correspond aucunement à l’idéal messianique. Car doté d’un cœur et d’un esprit nouveau, l’homme accomplira tout « naturellement » le bien sans qu’on puisse lui en accorder le moindre mérite.

Certes – précise Na’hmanide, les temps pré-messianiques exigent impérativement la souveraine liberté, le pouvoir d’être juste où malfaisant. Crée à l’image de Dieu, il est exclu que l’homme soit un clone, un pantin aux fils tirés par une volonté – fut-elle Divine – autre que la sienne. Au contraire, c’est précisément ce libre arbitre qui introduit le concept du mérite conférant distinction et dignité.

D’où la nécessaire interrogation : si la Création requiert l’homme qui se singularise par sa « station debout », souverain dans ses décisions, comment concilier cette exigences avec une finalité messianique qui, au contraire, décrit une humanité dénuée de libre arbitre? Puisque la dignité de l’homme implique qu’il puisse se déterminer par sa seule volonté, comment concevoir qu’aux temps futurs, sa condition sera celle d’un pantin qui n’a d’autre choix que celui d’accomplir « naturellement » le bien ?

Cette apparente contradiction est cependant levée lorsqu’on reprend l’argument développé par Na’hmanide selon lequel la liberté d’agir librement permet à l’homme qu’il « soit rétribué lorsqu’il fait le choix du bien et puni en cas de volonté du mal ».

3. L’aujourd’hui pour édifier et le demain pour rétribuer

 Afin de saisir la pleine mesure de ces considérations, il y a lieu d’abandonner tout regard puéril et pour tout dire, niais, concernant la rétribution du juste et la punition du malfaisant. Récompense et châtiment ne font, en réalité, qu’établir et ratifier l’être que l’ensemble des bonnes ou mauvaises actions a édifié. D’où les deux périodes qui segmentent l’Histoire, notion que le Talmud résume en une formule lapidaire : « l’aujourd’hui pour édifier et le demain pour rétribuer »[36]. Au cours de l’aujourd’hui pré-messianique, l’homme doit se déterminer, « s’édifier » donc, ce qui implique qu’il soit souverain dans ses décisions et libre d’agir comme bon lui semble. Et donc le demain post messianique ne fera qu’avaliser l’être constitué dans sa vie antérieure, et ceci en célébrant ses qualités et mérites qui ont façonné cette singularité qu’est la sienne.

Or, Israël se définit entièrement par sa vocation messianique, vocation qui engage, non pas à propager un message bien-pensant, mais bien à matérialiser dans les temps présents cet idéal appartenant au futur. Et puisque ce futur augure un monde où en l’absence du mal, le bien ne sera plus optionnel, l’ultime finalité du libre arbitre convie à approcher l’idéal messianique en accomplissant « ce qui est digne sans aucune autre inclination». En d’autres mots, l’Être Juif est appelé à restreindre volontairement sa « station debout », c’est-à-dire, en toute souveraineté par libre choix de manière à ce que le bien lui soit incontournable.
 

D’où l’enseignement juif enjoignant à ancrer de bonnes habitudes.

4. Circonscrire la station debout

Le mot hébreu « herguel » – pour « habitude », comporte la racine « reguel » qui signifie « pied », juxtaposition dont le justificatif réside dans la complexité du mouvement de la marche. Car en observant le ralenti, on remarque que marcher requiert une parfaite coordination des fonctions motrices, une fluidité sans laquelle le déséquilibre et la chute seraient inévitables. Or, ces mouvements s’effectuent sans y prêter la moindre attention, en pilotage automatique chevillé par la routine, raison pour laquelle la jambe sert d’expression au verbe « habituer ». En effet, « leharguil » – en hébreu, se traduit littéralement par « mettre en jambe ».

Inutile de s’étendre sur les dommages causés par des habitudes préjudiciables desquelles il est extrêmement difficile de s’arracher. Mais ce sont essentiellement les mauvais plis qui sont visés, ce laisser-aller qui tient lieu de libre choix, cette léthargie qui, émoussant toute vigilance et attention, entraîne l’homme à fouler au pied la parole divine[37]. Autant dire que le « herguel », les « jambes » donc, sont à même de triompher du libre arbitre jusqu’à annihiler lucidité et jugement, considérations qui, précisément, éclairent les invocations mentionnées concernant la « protection » des pieds.

Cela étant, capable du pire, l’habitude orientée positivement peut également devenir cause du meilleur. « C’est moi qui ai accoutumé Ephraïm, le soutenant par les bras »[38] – dit l’Eternel afin d’annoncer qu’Il s’efforça à habituer Israël au Bien[39]. Accoutumance à faire le bien et à rejeter le mal, ce sont ces considérations-là qui nous permettent d’élucider le signifié du concept « rectitude ». Notion plutôt floue car le verset « Tu feras le bien et le droit »[40], n’est-ce pas une tautologie dans la mesure où tout bien est nécessairement droit[41] ? Qu’est, en définitive, la rectitude ?

5. La voie de la rectitude

La rectitude – écrit le Maharal, décrit le Juste qui ne dévie jamais de la voie du milieu[42]. Par « milieu », on entend, non pas le juste milieu cher à Aristote, mais bien de faire le bien et de s’écarter du mal sans la moindre tergiversation tant la démarche s’impose d’elle-même. D’ailleurs, la résolution de soutenir l’être aimé, celle de ne point perpétrer un délit majeur, autorisent-elles de alternatives? 

Certes, opter pour le bien ou ne point commettre le mal après délibération intérieure, est tout à fait méritoire et, en tout état de cause, ne diminue en rien la valeur de l’initiative. Cependant, tant que sujet à de mouvements oscillatoires – fera, ne fera pas – susceptibles de le faire pencher tant d’un côté que de l’autre, l’homme ne peut prétendre à la rectitude.

Ces propos font évidemment écho aux développements de Na’hmanide cités plus haut selon lesquels « dans le futur messianique, le choix du bien sera naturel et le cœur n’aura aucun désir pour ce qu’est indigne». La rectitude, donc, emprunte au monde à venir par le fait d’accomplir ce qui est digne comme « allant de soi » sans aucune autre inclination, et corollairement, l’idéal juif décrit l’homme qui en toute souveraineté, fait le libre choix de restreindre sa « station debout ». Or, une habitude chevillée au corps est créatrice d’une « seconde nature », fonction qui, précisément, est celle attribuée à la chaussure.

6. ‘Hinoukh : cheviller de bonnes habitudes

« Na’al » [chaussure] peut se traduire par « verrou », tant il est vrai que dans l’enseignement juif, les souliers verrouillent le libre arbitre afin que le bien s’accomplissent en dehors de tout ballottement – fera, fera pas. Etre en mesure d’exercer sa véritable souveraineté en orientant positivement le pouvoir des pieds, restreindre la possibilité de dévier de la voie de la rectitude, tel est sens de l’action de grâce – « Béni soit Dieu qui pourvoit à tous mes besoins » qui se rapporte au fait d’avoir chaussure à son pied. Il y a lieu de noter qu’éloignées de toute idée d’allégorie, ces considérations traduisent l’importance attribuée par la Torah au discours du geste qui, bien plus que le phrasé du verbe, est à même de traduire la complexion humaine dans ce que celle-ci a de plus authentique, de véritablement naturel. D’ailleurs, les rêves, locution de la psyché par excellence, ne sont-ils pas entièrement basés sur ces données ? D’où les Mitsvoth, dont le gestuel est l’expression du lien transcendantal d’Israël avec Dieu. Dans le même esprit, lacer les chaussures annonce une disposition, celle de contingenter le libre arbitre conformément à l’idéal messianique[43].

‘Hanokh fut cordonnier car ce sont précisément les développements liés au « Na’al » [chaussures] qui permettent de définir le terme ‘Hinoukh. Ancrer l’idéal messianique, veiller à ce que le choix du bien soit une seconde nature et que le cœur n’ait point de désir pour ce qu’est indigne, c’est là le dessein de l’« éducation » tel que conceptualisé par l’enseignement juif. Aussi, le ‘Hinoukh se définit systématiquement par l’ancrage de bonnes habitudes tant il est vrai que ces notions sont indissociablement liées[44].

 Concrètement, cela signifie que dès la petite enfance, les jeunes soient accoutumés aux Mitsvoth de sorte que progressivement, leur accomplissement devienne une seconde nature dénuée d’alternatives. Notion à ce point primordiale que chaque jour lors de la prière du matin, nous invoquons l’Eternel en ces termes : « Dieu de nos pères, habitue-nous à ta Torah et lie-nous à tes Mitsvoth ». En effet, habituer signifie lier, finalité qu’est celle du ‘Hinoukh.

Eduquer est donc synonyme d’inaugurer, la vocation messianique – s’entend, dans la mesure où il s’agit de faire éclore chez les jeunes les dispositions leur autorisant à s’engager dans les voies de la rectitude qui définissent le vécu messianique.

Processus qui, cependant, concerne l’homme uniquement, et non la femme.


Chapitre II : le masculin et le féminin

1. Tu m’as configuré arrière et avant 

Comme point de départ, la Guemara[45]qui – ayant trait à l’Adam Primordial comportant deux faces, masculine et féminine[46], cite le verset – « tu m’as configuré arrière et avant »[47] dans lequel « arrière » désigne la femelle, et « avant » – le mâle[48]. Contrairement aux apparences, cet enseignement n’a rien de misogyne, bien au contraire, c’est l’essence du masculin et du féminin qu’est défini ici. Dans ce verset, « Kedem », traduit par « avant », exprime en fait la notion de commencement, tandis que « A’hor », pour « arrière » énonce l’idée de fin et d’aboutissement.

D’où les définitions suivantes : le mâle, configuré à l’avant de l’Adam Primordial, est l’expression du Beréchith-commencement, c’est-à-dire, de tout ce qui a trait à la Genèse de la Création ; la femelle configurée à l’arrière de l’Adam Primordial, est l’expression de l’A’harith, c’est-à-dire, de tout ce qui a trait à l’aboutissement messianique inhérent à la création.

Masculin : Corollairement, le masculin est porteur du devenir de la Création, et ceci en concordance avec Zakhar [mâle] qui se traduit également par « mémoire ». A l’exemple de ce processus mental dont la fonction est celle d’actualiser un passé qui sinon serait révolu, la vocation du Zakhar [mâle] est celle de pérenniser, celle d’assurer la continuité du devenir messianique inhérent au Beréchith, potentialité qui, en l’absence d’actuation de la mémoire, serait tombée dans l’oubli.

Féminin : Conformément à Nekéva [femelle] dont le signifié évoque toute action de fixer et de déterminer, le féminin est l’extériorisation du concept « aboutissement ». Si donc le masculin, en sa qualité de potentialité, est du ressort de l’indéfini, le féminin se rapporte à la finitude par le fait d’octroyer une concrétude au virtuel.  

Cette répartition se vérifie, bien-sûr, au niveau de la procréation. La semence masculine, paradigme du devenir, n’accède à l’être que par l’entremise d’un développement régenté par la femme uniquement. Développent qui, de surcroît, met en exergue sa réelle singularité. En effet, il y apparaît que la faculté de concrétisation, attribuée à la femme, n’a rien d’un achèvement d’un processus mais tout d’un véritable acte créateur et novateur quasi ex nihilo. Certes, en ce que concerne le processus de procréation, le masculin monopolise les prémices, lesquels, cependant, ne représentent rien en regard du nouvel être auquel la femme donne naissance.

Le masculin indéfini car au devenir encore inabouti, la féminin définie car l’expression de l’abouti, tels sont les concepts qui, en définitive, définissent respectivement l’homme et la femme.

Cette thématique sous-tend un remarquable enseignement du Maharal.

2. Femmes quiètes

Au préalable, le verset suivant :


Femmes quiètes, levez-vous, entendez ma voix; et vous, filles confiantes, écoutez mon discours[49].
 

 « L’engagement divin envers les femmes surpasse l’engagement envers les hommes »[50] – dit le Talmud en référence à ce verset, et donc davantage que les hommes, les femmes se singularisent par leur nature quiète et apaisée.

Constat pour le moins peu évident. Quiète et apaisée, la femme, ah bon ?! Mais comme à l’accoutumé, les Maîtres du Talmud vont à l’essentiel des choses, aussi, leurs propos sont incompréhensibles sans l’éclairage fondamental de l’enseignement juif.

La condition masculine – explique le Maharal, oblige à l’accomplissement de soi avec tout ce que cela comporte d’efforts et d’émulation, et par conséquent, les hommes sont moins prédisposés au monde futur qui, précisément, n’est qu’apaisement et plénitude. Les femmes, par contre, répondent à la notion d’aboutissement inhérent au monde à venir, raison pour laquelle elles se distinguent par leur quiétude et par leur nature apaisée[51].

Bien entendu, ce développement correspond au postulat mentionné : l’homme, expression de la potentialité du futur messianique, se situe dans le devenir, tandis que la femme, reflétant l’aboutissement du futur messianique, exprime l’être. De surcroît, cette notion de quiétude renseigne de la mainmise du « devenir » et de l’« être » sur respectivement le masculin et sur le féminin. Selon ces considérations, l’homme, en sa qualité de devenir, décrit un être en puissance appelé à se réaliser, alors que la femme – accomplie – est uniquement conviée à ne point altérer sa condition d’être[52].

Cela étant, on est en droit de se demander si au-delà de leur caractère purement conceptuel, ces distinctions n’influeraient-elles pas sur la complexion de l’homme et de la femme, ne marqueraient-elles pas concrètement leur singularité jusqu’à justifier l’idée de distinction typologique entre le masculin et le féminin ?

3. La ‘Hokhma et la Binah

Concernant la distinction typologique entre le masculin et le féminin, cet énoncé talmudique selon lequel – « Dieu octroya à la femme un surcroît de « Binah » par rapport à l’homme »[53].

Fondamentalement, la Binah est un attribut divin en charge de conduire le monde au futur messianique, et ceci en tenant compte de toutes les contingences possibles. Le « surcroît » de « Binah » qui, selon le Talmud, fut octroyé à la femme, est donc conforme à l’enseignement associant le féminin à l’« être » messianique, et ceci par rapport au masculin qui conceptualise le « devenir ». En vérité, la « Binah » définit entièrement la nature de la femme, et corollairement celle de l’homme, aussi, est-il indispensable d’en saisir la signification précise, ce qui n’est pas évident.

Dans la Torah, le terme « Binah » figure dans le  verset qui a trait à la désignation de Betsalel comme maître d’œuvre du Tabernacle. Afin de rassurer Moïse sur les aptitudes de ce dernier, l’Eternel lui annonce qu’il a comblé Betsalel « de ‘Hokhma et de Binah »[54], deux qualités qui, manifestement, expriment une clairvoyance, mais dont le sens exact est incertain. En témoignent les versions françaises qui, diversement, traduisent ‘Hokhma par – habileté ou sagesse, et Binah par – discernement, intelligence ou jugement, autant de propositions qui n’ajoutent qu’au flou.

 Aussi, aurons-nous recours aux définitions de Rachi :
 

Hokhma : ce qu’on recueille des autres et qu’on apprend.

Binah : les choses apprises qu’on appréhende avec cœur[55].
 

La ‘Hokhma désigne tout savoir, expérience et compétence, bref, tout acquis recueilli auprès des autres. Aussi longtemps qu’il est question de ‘Hokhma, ces connaissances ne dépassent pas le conceptuel et restent de pures constructions de l’esprit sans la moindre incidence sur la personnalité de leur acquéreur.

 La Binah – explique Rachi, se rapporte aux choses apprises qu’on appréhende avec cœur. Contrairement à la ‘Hokhma qui signale un état cognitif statique, la Binah décrit une animation, celle d’un savoir qui imprègne la conscience, qui modifie le regard et l’entendement de l’homme, qui influe sur ses décisions et qui oriente sa conduite. Bref, la Binah – conformément à sa connotation étymologique d’« édifice », a trait à un acquis qui édifie l’homme, qui le construit et qui structure sa personnalité. D’où ce Midrache percutant :
 

Grande est la Binah devant l’Eternel davantage que la Torah, puisque si même l’homme lit la Torah, les Prophètes et les Hagiographes, qu’il étudie la Michna et ses commentaires, les lois et les homélies, l’enseignement oral et ses addendum, les proverbes et les ma’amadoth[56] – et qu’il soit dépourvu de Binah, sa Torah est dénuée de toute valeur[57].  
 

La Torah reste lettre morte si elle n’édifie pas l’homme.

En tout état de cause, il n’y a de Binah possible sans le préalable de la ‘Hokhma. Ce n’est qu’après son acquisition qu’un savoir peut mûrir pour se développer en expérience de vie assimilée et incorporée par l’homme. Dans cette optique, la ‘Hokhma s’apparente à une bulle éthérée, qui, dénuée de tout retentissement, n’est existante que pour celui qui en est le dépositaire. En l’insérant dans le vécu, la Binah extraie le conceptuel de sa discrétion pour lui octroyer une tangibilité qui, jusqu’à présent, lui faisait entièrement défaut. Selon cet ordre d’idée, la ‘Hokhma – en attente d’aboutissement – est du ressort du « devenir », tandis que la Binah se situe dans l’« être ». D’où la conclusion : la ‘Hokhma se conjugue au masculin, la Binah – au féminin[58].

Corolairement, l’homme doit consacrer bien d’efforts pour qu’une cognition puisse conquérir son cœur et influer son vécu, processus qui chez la femme, est plus « naturel » car inhérent à sa singularité. En définitive, l’homme a tendance à cloisonner entre le conceptuel et leur passage dans le tangible, deux champs en lui qui ne sont pas nécessairement en phase, tandis que chez la femme, ces deux champs, alignés l’un sur l’autre, s’agencent et s’inspirent mutuellement. Telles, sont, en définitive, les données fondamentales qui, selon l’enseignement juif, différencient le masculin du féminin.

4. L’« esprit léger » de la femme

C’est également cette proposition-là qui sous-tend cette autre sentence talmudique – « nachim da’atan kalah »[59], formule qui semblerait attribuer aux femmes un « l’esprit léger », c’est-à-dire, un naturel irréfléchi et aisément malléable. Mais ici encore, la portée de cet enseignement se situe ailleurs.

 « Da’at », habituellement traduit par « raison » et « esprit », est un concept d’une rare complexité en raison de ses nombreux angles. D’une manière générale, « Da’at » est en rapport avec la notion de connexité, aussi, peut-on peut parler de discernement, et plus spécifiquement, de la faculté à relever des connexions entre éléments d’apparence disparate. Cependant, « Da’at » désigne aussi, et surtout, le facteur assurant la jonction entre les composantes de la psyché humaine que sont, le cerveau – siège de l’intellect, le cœur – domaine de l’affect, et enfin les bras – articulant le passage à l’acte, trois fonctions absolument hétérogènes qui en l’absence d’agent homogénéisant, n’auraient point été en mesure de s’agréger et de s’harmoniser en un tout cohérent.

Raison pour laquelle l’enseignement juif situe la « Da’at » dans le bas de la nuque[60], emplacement où se joignent la tête, le torse où se situe le cœur, et les bras. Aussi, la Torah parle-t-elle de « nuque raide », locution évoquant l’entêtement du peuple juif à ne point se conformer à la Volonté divine. Cette « raideur » décrit donc l’absence de souplesse et de fluidité entre l’intellect, l’affect et le passage à l’acte, et par conséquent, le cœur, point en phase avec la raison, n’initie pas l’action conforme à la Volonté divine.  

Or, l’expression « da’at kalah » est l’antonyme de « nuque raide »[61]. Il n’est donc pas question de « légèreté d’esprit » – au sens d’inconstance, mais bien d’aisance qui porte la femme à harmoniser idéel, affectif et praxis, et à s’investir activement et avec cœur dans toute cause à ses yeux justifiée. « Nuque raide » versus « légèreté d’esprit », voilà donc l’essentiel de la disparité typologique entre le masculin et le féminin, essentialité entraînant que l’homme soit davantage exposé aux affres du libre arbitre que la femme. En effet, la ligne de fracture entre l’intellect, l’affect et le passage à l’acte, a comme conséquence que chacune de ces démarcations autorise des mouvements oscillatoires – fera, ne fera pas – susceptibles de le faire pencher tant d’un côté que de l’autre, tergiversations qui chez la femme est bien moindre. Disparité entre le masculin et le féminin d’ailleurs manifeste dès la constitution des Juifs en tant que nation.

5. Parler aux femmes, notifier aux hommes 

Ainsi, en guise de préalable à la remise des Tables de la loi, Dieu s’adresse à Moïse en les termes suivants : « Tu parleras à la maison de Jacob, et tu notifieras aux enfants d’Israël  (…) vous serez pour moi une dynastie de pontifes et une nation sainte »[62]. L’observation saute aux yeux : à qui se réfèrent les expressions « maison de Jacob » et « enfants d’Israël », et pourquoi faut-il « parler » aux premiers et « notifier » aux seconds ? Réponse du Midrache : « maison de Jacob » décrit la communauté féminine tandis que « enfants d’Israël » désigne le collectif masculin. Aussi, la parole adressée aux femmes se doit d’être affable et bienveillante, mais en ce que concernent les hommes, il importe que le message qui leur est destiné soit ferme et même comminatoire[63].

D’évidence, ces approches divergentes cadrent avec la proposition qualifiant les femmes de « légères d’esprit » et les hommes d’individus à la « nuque raide ». Par conséquent, aux hommes, ces propos doivent être « notifiés » afin d’éviter qu’ils ne réduisent la Torah au rang d’une ‘Hokhma, d’un savoir sans incidences sur le vécu. Tandis qu’aux femmes, il  suffit de leur « parler », c’est-à-dire, de requérir leur adhésion, puisque leur conviction une fois établie, elles seront « naturellement » portées à concrétiser la parole divine.

Bien entendu, toute médaille a son revers. Puisque la femme tend aisément à s’investir dans la réalisation d’un projet dans lequel elle a foi, elle court plus souvent le risque d’être abusée et d’œuvrer pour de causes inopportunes. Mais en définitive, toutes ces développements répondent à cette essentialité : l’homme est l’expression de la ‘Hokhma, de l’idéel, tandis que la femme est définie par la Binah, attribut qui la porte à se vouer à la matérialisation du conceptuel.

6. La femme n’a d’autre ‘Hokhma que la quenouille

Aussi, ce verset relatant le tribut des femmes dans l’édification de la Tente d’assignation : « toutes les femmes dont le cœur était porté par la ‘Hokhma, filèrent de leurs mains, et apportèrent tout filés, l’azur, la pourpre, l’écarlate et le lin »[64]. Commentaire du Talmud : « la femme n’a d’autre ‘Hokhma que la quenouille »[65]. Cela porta à croire qu’aux yeux des Maîtres du Talmud, les capacités intellectuelles des femmes se limitent au filage, d’autant plus que depuis l’Antiquité, ce travail était le symbole par excellence d’une activité féminine, au point qu’un homme filant tenant une quenouille, était considéré comme le comble de l’humiliation. Cela étant, le texte talmudique est d’une toute autre portée.

Déjà, le libellé du verset susmentionné est édifiant puisqu’il y est question de « ‘Hokhmath-lev », c’est-à-dire, de la ‘Hokhma qui touche le cœur, locution désignant la Binah, distinctif de la femme.
 

« La Binah qui touche le cœur a trait à la femme en particulier, car les mains sont des ramifications du cœur puisque c’est le cœur qui initie toute action, et donc la ‘Hokhma de la femme se situe dans la quenouille, c’est-à-dire, dans leur capacité d’agir »[66].
 

 Le sens de ce verset est donc le suivant : portée par la Binah, la singularité des femmes œuvrant pour la Tente d’assignation se manifesta jusqu’aux bouts de leurs doigts, dans leur manière de filer l’azur, la pourpre, l’écarlate et le lin.

Proposition magistralement résumée dans le denier chapitre des Proverbes entièrement consacré à l’éloge de la femme : « Elle ouvre la bouche avec ‘Hokhma, et des instructions de bienfaisance sont sur sa langue »[67]. C’est tout dire. La ‘Hokhma, conjuguée au féminin, sera toujours génératrice d’un passage à l’acte, et ceci conformément à la Binah qui constitue le caractère ontologique de la femme.

D’où la conclusion : le ‘Hinoukh concerne l’homme et non la femme.

7. le ‘Hinoukh concerne l’homme et non la femme

« Eduquer » au sens talmudique du terme, signifie – répétons-le, apprêter l’Etre Juif à sa vocation messianique, idéal qui consiste à accomplir le bien sans tergiversations – fera, ne fera pas.

Chez l’homme, il y a « raideur » entre l’intellect, l’affect et le passage à l’acte, aussi, doit-il consacrer bien d’efforts pour acquérir cette posture messianique qui exige la parfaite connectivité entre le cognitif et le vécu. Le ‘Hinoukh n’a donc d’autre but que celui d’assouplir cette rigidité qui – comme l’indique le Maharal, rend l’homme moins prédisposé au monde futur.

Mais chez la femme, cette posture est inhérente à son être, et par conséquent, nul besoin d’efforts et d’émulations pour se trouver en phase avec l’idéal du monde à venir. Et puisque le féminin répond par définition à la notion d’aboutissement messianique, le ‘Hinoukh, en ce qui concerne la femme, ne ferait qu’enfoncer une porte ouverte. La femme spontanément prédisposée à l’idéal messianique et l’homme qui ne l’est point, c’est précisément cette disparité ontologique qui dispense la mère du ‘Hinoukh de son fils. Régulation qui, par ailleurs, traduit une pédagogie indéniable.

 Car, véritable initiateur, l’éducateur doit inspirer la voie des jeunes. Participer à leur épanouissement exige donc une figure formée par un même parcours puisqu’en l’absence de cette expérience commune, il se créé une hétérogénéité empêchant cette initiation. Raison pour laquelle le ‘Hinoukh est un devoir du père envers son fils, tous deux unis en une vocation messianique requérant un même et unique cheminement.

8. Et le renouveau?

Créer une seconde nature limitant le libre choix, cheviller l’habitude d’accomplir les Mitsvoth afin d’assurer la fluidité entre le cognitif et le passage à l’acte, c’est donc là le sens du ‘Hinoukh au sa qualité d’initiation au vécu messianique. Mais cela étant, ne serait-on pas en droit de parler de démarche sclérosante ? Car comme le disait Péguy, « il y a quelque chose de pire que d’avoir une âme même perverse. C’est d’avoir une âme habituée »[68] ! Et ceci d’autant plus que bien avant Péguy, les Ecritures ne se privèrent point de blâmer quiconque assimile les préceptes à un rituel observé par pure tradition qui accompli sans cœur, ne dépasse point la bouche et les lèvres[69]. Raison pour laquelle les prophètes, comme d’ailleurs les Maîtres du Talmud, insistèrent tant et plus sur l’impératif du renouvellement. Aussi, dans son commentaire sur le verset « En ce jour, l’Eternel ton Dieu te recommande d’exécuter ses diverses lois »[70] le Midrache, en référence à la locution « En ce jour », fait observer que les préceptes de la Torah doivent être aussi neuf qu’au jour où ils ont été promulgués[71]. Et cela d’autant plus que, comme l’évoque Na’hmanide cité plus haut, le prophète Ezéchiel décrit les temps futurs en termes d’avènement dotant les hommes d’« un cœur nouveau et d’un esprit nouveau »[72], et pareillement, le prophète Isaïe parle de « cieux nouveaux et terre nouvelle » pour annoncer le futur messianique[73]. Cela signifie que, contrairement aux temps présents où toute immuabilité est génératrice d’usure et de vieillissement, le monde à venir, en dépit de son caractère permanent et immuable, augure un espace-temps où le ressenti du renouvellement, du re-commencemen, donc, sera dominant. Or, puisque le ‘Hinoukh entend initier les jeunes au vécu messianique en faisant d’eux des accoutumés aux Mitsvoth, de quelle façon les préservera-t-on de cet écueil d’« âmes habituées » ?

D’où le rôle de la mère dans le processus du ‘Hinoukh.

Chapitre III : la Torah de la mère

1. Père et mère dans l’éducation juive
 

Entends, mon fils, l’appel à l’ordre de ton père, et ne délaisse pas la Torah de ta mère; car ils sont parure de grâce pour ta tête et collier pour ton cou[74].

Mon fils, sois fidèle aux recommandations de ton père, ne délaisse pas la Torah de ta mère. Porte-les constamment attachés à ton cœur, noués à ton cou[75].

Versets complémentaires évoquant tous deux l’apport du père et de la mère dans la complexion du fils. Cela étant, ces versets ne brillent point par leur limpidité. Déjà, il ne sont point évidents, ni le signifié du panégyrique – « parure de grâce pour ta tête et collier pour ton cou », ni la recommandation « noués à ton cou ». Mais c’est surtout la locution sibylline « Torah de la mère » qui suscite le questionnement. Y aurait-il une Torah qui ne pas soit celle du père ? En définitive, quelle est la portée de l’appel à l’ordre – prérogative du père, et celle de la Thora – attribution de la mère ?

En vérité, nombreuses sont les interprétations répondant à ces interrogations[76], mais pour notre part, nous retiendrons celle du Gaon de Vilna qui, d’une certaine façon, les englobe toutes. L’appel à l’ordre et les recommandations du père se référent à la ‘Hokhma  tandis que la Torah de la mère se traduit par la Binah[77]. Et lorsque nous ajoutons l’explication du Maharal selon laquelle l’appel à l’ordre du père se rapporte au ‘Hinoukh visant à accoutumer le fils aux Mitsvoth[78], l’entendement des versets cités se révèle avec précision.  

Le ‘Hinoukh inculque la ‘Hokhma dans la mesure où ces appels à l’ordre, en l’occurrence – ceux appelant à l’accomplissement Mitsvoth, n’engageront jamais le cœur des jeunes. Car, discipline répétitive visant à créer des êtres habitués à la pratique des préceptes, les recommandations du père susciteront le respect mais non l’amour pour la Torah[79]. D’où la nécessité de ne point délaisser la Torah de la mère, à savoir – celle de la Binah. Et lorsque ces deux vertus – la ‘Hokhma du père et la Binah de la mère – se complètent, celles-ci sont «parure de grâce pour ta tête et collier pour ton cou » en raison des acquis du ‘Hinoukh désormais  « constamment attachés à ton cœur ». Collier noué à ton « cou » puisque dorénavant, ce point de jonction gracile et souple assure  l’harmonisation entre l’intellect et l’affect, empêchant ainsi les altérations néfastes consécutives à la « nuque raide ».

Entendre l’appel « des pères » engageant à accomplir les Mitsvoth sans tergiversations « fera – fera pas », laisser ce devoir s’inscrire dans le cœur et pénétrer jusqu’au fond de entrailles, telles sont en définitive les deux composantes que père et mère doivent enraciner dans la complexion du fils. Subsiste la question : que doit faire la mère pour transmettre sa Torah, celle de la Binah ? La réponse est à l’avenant : rien !

2. « Surcroît » de Binah

Nous reprenons la sentence du Talmud selon laquelle « L’Eternel octroya à la femme un surcroît de « Binah » par rapport à l’homme ». « Surcroît », ce qui implique une vertu certes présente mais dans une moindre mesure chez l’homme que chez la femme. Constat échappant au bon sens. Comment, en effet, est-il possible de quantifier une faculté, en vertu de quelle aune évalue-t-on la Binah ? Y répondre oblige à recourir aux lumières du Maharal.

Dans la conception de l’enfant, la femme lègue tout ce qui est du ressort de la finitude tandis que la part de l’homme est celui de l’idéel – écrit-il[80]. Or, rien n’appartient plus à la finitude que la Binah, mot qui contient la notion d’« édifice » tant il est vrai que cette vertu édifie et octroie une tangibilité. En affirmant que la mère lègue à son fils tout ce qui est propre à la finitude, cela implique que celui-ci en reçoit les prémices[81] – dont l’amorce de la Binah, avec à charge du jeune de développer cette faculté par lui-même. En d’autres mots, l’inné féminin n’atteindra sa concrétude chez l’homme qu’à l’âge de la quarantaine[82], étant entendu que « quarante » indique une nécessaire durée évolutive[83].

Qui plus est, la notion de finitude implique celle de la discontinuité puisque tout achèvement, tout aboutissement implique, par définition, l’interruption d’une persistance, l’arrêt d’un devenir. Autant dire que la Binah est synonyme de « nouveau » dans la mesure où tout neuf signifie la cessation d’une durée antérieure. Etablir que la mère lui lègue l’amorce de la Binah, revient donc à octroyer au fils la faculté d’insuffler un renouveau dans l’accomplissement mille fois répété des Mitsvoth, de manière à ce que le répétitif se mute en perpétuel re-commencement approchant en cela les « cieux nouveaux et terre nouvelle » qui augurent le futur messianique[84].

Remarquablement, ce sont ces données-là qui, précisément, doivent définir l’attache entre parents et enfants.

2. La fête du Pèlerinage et la Soucca

Dans la Torah, il n’y a point de commandements explicites concernant l’obligation du ‘Hinoukh, toutefois, les Maître du Talmud se sont évertués à trouver deux « Asmakhtaoth », c’est-à-dire, deux exégèses faisant indirectement référence au devoir d’éduquer et d’accoutumer les jeunes encore mineurs à l’accomplissement des préceptes. La première de ces exégèses a trait à la Mitsvah de se rendre au Temple de Jérusalem lors des trois fêtes de pèlerinage, la seconde concerne l’injonction de résider sept jours dans la Soucca. Aussi l’interrogation : à partir de quel âge est-il souhaitable d’implanter ces habitudes chez l’enfant ? Le Talmud nous propose deux critères distincts.

La participation au pèlerinage à Jérusalem requiert la capacité de l’enfant à être juché sur les épaules de son père – enseigne l’école de Chamaï, de donner la main à son père – enseigne l’école de Hillel[85]. Quant à la Mitsvah de la Soucca, l’enfant l’observera dès qu’il se sera détaché de sa mère – dit la Michna[86]. C’est-à-dire – explicite Rabbi Chimone ben Lakiche, à partir du moment qu’il n’appelle plus Maman, Maman à son réveil[87]. Signifiant : dès que, conscient qu’un seul appel suffit pour faire accourir sa maman, il cesse de réclamer sa présence d’une façon répétitive jusqu’à obtenir satisfaction[88].

Deux sources référentielles qui donnent lieu à deux critères distincts. Seulement voilà, la nécessité de deux références n’est déjà en soi point évidente. Mais ce sont surtout ces critères qui étonnent, et plus particulièrement, celle concernant la Soucca. D’une manière générale, il y a lieu d’habituer le mineur aux Mitsvoth dès que celui-ci en possède l’habileté de les pratiquer[89], aussitôt que, par exemple, l’enfant soit capable d’appréhender un Loulav, de s’enrouler des Tsitsith, de veiller sur ses Tefilline ou de prononcer les bénédictions – dit le Talmud[90]. Dès lors, pourquoi ce critère particulier concernant la Soucca, pourquoi cette indication étrange d’« appel à la mère » ?

En vérité, la fête de Pèlerinage et la Soucca répondent aux fondamentaux du ‘Hinoukh.

 La fête de Pèlerinage : « Voir le Seigneur et être vu par Lui » – disent les Maîtres du Talmud[91] pour évoquer ce véritable face à face entre Israël et Dieu que constituent les trois fêtes de pèlerinage. Or, la Torah désigne ces fêtes par le terme « regalim » qui signifie également « pieds », et donc l’acte d’effectuer ce pèlerinage se traduit littéralement par « élévation des pieds ». Aussi – disent les Maîtres du Talmud, la raison d’être de ce verset « Que tes pieds sont beaux dans ta chaussure »[92] faisant l’éloge des pèlerins qui « élèvent les pieds »[93].

Paraître face au Seigneur pour voir et être vu, être chaussé de brodequins qui embellissent les pieds, autant de notions qui renseignent sur ce face à face empreint de considération mutuelle. Au cours de ce pèlerinage, l’Etre Juif, face à Dieu, fait donc état de sa souveraineté, l’authentique « station debout », celle qui, couronnant la limitation intentionnelle de son propre libre arbitre, permet d’accomplir le bien sans autre inclination que l’appel au devoir du père. Mais cette filiation n’est point possible sans le ‘Hinoukh adéquat, sans que, dès son plus jeune âge, l’écoute de l’« appel à l’ordre » se confonde avec l’image du père qui tient son enfant par la main, qui le juche sur ses épaules, exemplarité d’une figure paternelle qui accompagne son fils dans sa marche vers la rectitude.

La Soucca : Habitat dont l’édification augure la présence divine telle que celle-ci se manifestera dans les temps futurs[94], la Soucca conceptualise l’aboutissement messianique et est à ce titre l’expression de la Binah[95]. Raison pour laquelle les Maître du Talmud s’évertuèrent à proposer une source référentielle supplémentaire à celle de la fête du Pèlerinage. Car si cette dernière reflète l’apport du père dans le Hinoukh, la Soucca diffuse celui de la mère. Cela explique que, toujours dans ce même ordre d’idée, le Talmud se fasse l’écho de la reine Hélène accoutumant ses sept fils mineurs à l’accomplissement du commandement de la Soucca, et ce, sous l’égide des autorités rabbiniques[96]. Aussi, alors que l’âge requis du ‘Hinoukh pour le pèlerinage au Temple se rapporte au père, le critère pour la Soucca a trait à la mère.

Dès qu’ayant coupé le cordon ombilical, l’enfant ne soit plus constamment attaché à sa mère. Dès que conscient qu’un seul appel suffit pour que sa maman accoure, il cesse de réclamer sa présence d’une façon répétitive jusqu’à obtenir satisfaction – précise Rabbi Chimone ben Lakiche. Et ici également, le caractère métaphorique y est transparent.

En d’autres mots, aussi longtemps que dure son inséparable attachement envers sa maman, il y a lieu d’établir que la Binah léguée par sa mère lui est restée, telle quelle, à l’état de prémices.  Mais aussitôt qu’il manifeste une certaine autonomie, celle-ci marque le début d’un état évolutif, celui de la Binah – en l’occurrence, démarche dans laquelle la mère « pilier du foyer »[97] reste et doit rester un appel, une indéfectible source d’inspiration. Et ce n’est qu’à ce moment-là que l’initiation au vécu messianique peut prendre son envol, lorsque la Torah de la mère – celle du cœur autorisant le renouveau – mute l’accomplissement mille fois répété des Mitsvoth en perpétuel re-commencement, approchant en cela les « cieux nouveaux et terre nouvelle ».

Aboutissants

Notre point de départ fut – rappelons-le, la sentence de rabbi Chimone ben Lakiche selon laquelle « l’homme a l’obligation d’éduquer son fils dans l’observation des Mitsvoth, la femme n’a point le devoir d’éduquer son fils, [l’homme] se doit d’éduquer son fils et non sa fille ». Cependant, c’est ce même rabbi Chimone ben Lakiche qui précise ce critère ayant trait à la mère : le mineur d’âge devra être accoutumé à la Mitsvah de la Soucca à partir du moment qu’il n’appelle plus Maman, Maman, à son réveil. Ces deux énoncés, ne seraient-ils pas quelque peu contradictoires ? Si le ‘Hinoukh est une affaire entre père et fils uniquement, n’est-il pas singulier de s’en référer à la mère pour établir l’âge à partir duquel il est souhaitable d’initier l’enfant aux Mitsvoth ? La réponse est non, ce n’est ni contradictoire ni singulier, à condition toutefois de s’en maintenir à la définition « messianique » de l’éducation juive : habituer, mettre en place une seconde nature  dans la pratique des Commandements divins. Et cela afin de se conformer aux temps futurs où – ainsi que l’écrit Na’hmanide, « le choix du bien lui sera naturel et son cœur n’aura de désir pour ce qu’est indigne ». Et selon ces considérations-là, le ‘Hinoukh, en effet, ne concerne non pas mère et fille dont la proximité au futur messianique est innée, et donc, immédiate, mais uniquement père et fils moins prédisposés au monde à venir. Car en vertu d’un principe ancré dans l’enseignement juif, éduquer signifie avant tout faire part d’une exemplarité, jucher l’enfant sur les épaules, marcher main dans la main afin de lui tracer la voie à suivre. Et puisque se conformer à l’idéal messianique requiert de l’homme un cheminement différent à celui de la femme, cette démarche constitue une expérience qui réunit père et fils, et non mère et fils ou père et fille.

Toutefois, créer une seconde nature limitant le libre choix, cheviller l’habitude d’accomplir les Mitsvoth afin d’assurer la fluidité entre le cognitif et le passage à l’acte, ne serait-on pas en droit de parler de démarche sclérosante ? Puisque le ‘Hinoukh entend initier les jeunes au vécu messianique en faisant d’eux des accoutumés aux Mitsvoth, de quelle façon les préservera-t-on de l’écueil propre aux « âmes habituées » ? D’où l’indispensable apport de la  « Torah de la mère », celle de la Binah. Et pour transmettre cette Torah, nul besoin de lui tenir sa main, de jucher l’enfant sur ses épaules. Car la présence de la mère auprès de l’enfant est immédiate, et donc contrairement à l’homme pour qui éduquer signifie partager activement une même expérience, la femme « guide » ses enfants par le seul fait d’être, sans devoir faire appel à une pédagogie particulière. Ou selon l’énoncé de rabbi Chimone ben Lakiche, le ‘Hinoukh actif concerne uniquement père et fils, et non mère et fils ou fille.

  D’où les deux démarches, celle de l’« appel à l’ordre » du père à laquelle il y a lieu d’associer la « Torah de la mère ».

Certes, le ‘Hinoukh, accoutumer son fils aux voies de la rectitude, est une obligation qui concerne le père uniquement. Mais veiller à ce que la rectitude devienne une vocation, un véritable sacerdoce, ce devoir du cœur, donc, est une initiation dont l’amorce émane de la mère, et à ce titre, père et mère, chacun selon leur essentialité, interviennent conjointement dans la complexion de l’enfant. Ce n’est qu’alors que le conditionnement au vécu messianique peut prendre son envol, lorsque la Torah de la mère, autorisant le renouveau, mute l’accomplissement mille fois répété des Mitsvoth en perpétuel re-commencement, approchant en cela les « cieux nouveaux et terre nouvelle ».

Tout cela en regard du ‘Hinoukh dans son acceptation restreinte d’initiation au vécu messianique. Concept cependant sans rapport avec l’éducation compris au sens large et classique du terme, celui d’œuvrer à l’épanouissement des jeunes, à la propagation des valeurs qui sont les nôtres, transmission qui englobe d’égale façon père, mère, fils et filles. C’est là l’entendement de la sentence talmudique citée[98] : « A celui qui guide ses fils et ses filles dans le droit chemin, s’applique le verset – « Tu connaîtras un havre de plénitude » [99].

Plénitude dans laquelle s’unissent père et mère.

[1]Ce présent article est à la base de la conférence donnée à Paris le 23 janvier 2018.

[2] Rabbins du Talmud.

[3] Réflexions sur l’éducation juive dans Difficile Liberté, Albin Michel, Paris 1963, p.300.

[4] Nazir 29b.

[5] Job 5, 24.

[6] Yebamoth 62b.

[7] Rabi Yechaiah Horowitz (1565 – 1630) dans Chné Lou’hoth Habrit, Cha’ar haOtioth (4) Derekh Eretz.

[8] Sanhedrin 70b et Rachi id.

[9] Rabbi Yts’hak Abouhav (env. 1300) dans Menorath ha Maor, Ner 3 klal 6 II, chap. 2 alinéa 168.

[10] Nombres 7, 10 e.a.

[11] Deutéronome 20, 5.

[12] Rois I 8, 63.

[13] Néhémie 12, 27.

[14] Genèse 14, 14.

[15] Rachi Id.

[16] Rachi Deutéronome 20, 5 ; Chavouoth 15a.

[17] Genèse 5, 22 et 24.

[18] Meirath Einaïm de Rabbi Its’hak. D’Acre, Edition Goldreich, Jérusalem 1971, tome II p. 46.

[19] Maharal Be’er haGolah, VIe partie.

[20] Berakhoth 60b.

[21] Jeremie 2, 25.

[22] Chabbath 129a.

[23] I Samuel, 2, 9.

[24] Proverbes 3, 26.

[25] Psaumes 91, 12.

[26] Chabbat 63b.

[27] Sanhédrin 38b.

[28] Id.

[29] Voir Sanhedrin 44a.

[30] « Être juif » dans Cahiers d’études lévinassiennes No 1, 2002, p.103.

[31] Chabbat 88a.

[32] Aboth 2, 8.

[33] Deutéronome 30, 6.

[34] Ezéchiel 36, 26.

[35] Shabbat 151b.

[36] Erouvin 22a.

[37] Voir Deutéronome 7, 12

[38] Osée 11. 3

[39] Voir Rachi et Radaq, id.

[40] Deutéronome 6, 18.

[41] Voir Deutéronome 6, 18 et id. 12, 28 ainsi que le commentaire de Rachi.

[42] Voir Maharal, ‘Hidouché Aggadoth sur Chabbat 152a ; id. sur Avodah Zara 25a.

[43] Il y a lieu d’associer ces considérations aux propos du Maharal, ‘Hidouché Aggadoth sur Chabbath 61a.

[44] Voir Michna Yoma 8, 4 ; Maimonide sur la Michna Mena’hoth 4, 4 ; Rachi Souccah 2b ; e.a.

[45] Berakhoth 61a.

[46] Genèse 1, 27 : « Dieu créa l’Adam à son image; c’est à l’image de Dieu qu’il le créa. Mâle et femelle il les créa ». Verset qui recèle une contradiction : si ce sont homme et femme qui furent crées, pourquoi l’Adam est-il mentionné au singulier [« à l’image de Dieu qu’il le créa »] ? Réponse du Talmud : originellement, l’Adam Primordial fut une créature unique qui, cependant, comporta deux faces, masculine et féminine (Berakhoth 61a).

[47] Psaumes 139, 5.

[48] Zohar II, 231a. Bien entendu, cet enseignement présente une similitude avec Janus, le dieu à deux visages de la mythologie romaine. Cette ressemblance corrobore notre conviction selon laquelle les mythes, expressions de mémoires collectives, ne sont autres que des thèmes dénaturés de l’enseignement juif. 

[49] Isaïe 32, 9.

[50] Berakhoth 17a.

[51] Maharal, Derouche al HaTorah.

[52] Nous reviendrons sur cette distinction fondamentale. Mais déjà, celle-ci éclaire la raison pour laquelle nombreuses sont les Mitsvoth s’adressant uniquement aux hommes, mandés à se soustraire de l’ordre naturel du monde, et non aux femmes, libres de cette obligation.

[53] Niddah 45b.

[54] Exode 31, 3.

[55] Rachi ibid.

[56] Extraits de la Torah récités lors des sacrifices.

[57] Midrache Otioth deRabbi Akiba HaChalem, version I paragraphe 2.

[58] Igereth haKodech, œuvre attribuée à Na’hmanide. On notera que ce thème est récurrent dans le Zohar.

[59] Voir Kidouchine 80b et le commentaire de Rachi.

[60] Voir Rabbi Isaac Luria, Peri Etz ‘Haym, Sha’ar HaTefilline chap. 4.

[61] Rabbi Tsadok HaCohen, Likouté Ma’amarim, paragraphe 16.

[62] Exode 19, 3-5.

[63] Mekhilta Parechath Ha’Hodech chap. 2. Observons que, faute de mieux, nous avons traduit le verbe « taguid » par « tu notifieras ». En fait, le vocable hébreu contient le mot « guid » qui signifie « tendon », d’où le commentaire du Midrache que le discours adressé aux hommes « fut aussi dure qu’un tendon ».

[64] Exode 35, 25.

[65] Yoma 66b.

[66] Rabbi Tsadok HaCohen, Likouté Ma’amarim, paragraphe 16.

[67] Proverbes 31, 26.

[68] Charles Péguy, Œuvres en prose 1909-1914, éd. Gallimard, coll. Bibliothèque de la Pléiade, 1959, p. 1397

[69] Voir Isaïe 29, 13 : « Le Seigneur dit: (…) Ce peuple m’honore de la bouche et des lèvres, mais son cœur est éloigné de moi, et sa piété à mon égard n’est qu’observance routinière ».

[70] Deutéronome 26, 16.

[71] Psikté de Rav Kahane, paragraphe 12 alinéa 5.

[72] Ezéchiel 36, 26.

[73] Isaïe 65, 17.

[74] Proverbes 1, 9-10. Nous avons traduit Moussar par « rappel à l’ordre qui nous semble plus précis que « remontrance » habituellement proposée.

[75] Id. 6, 20-21

[76] Voir Rachi Proverbes 1, 9 ; Berakhoth 35b ; ‘Hulin 93b et Pesa’him 50b.

[77] Commentaires sur Proverbes 6, 20. Le Gaon suit en cela le Zohar II 85a.

[78] Maharal Netivoth Olam, Netiv Derekh-Eretz chap. 1.

[79] Id.

[80] Maharal Derouche al haTorah, d’après Nidda 31a.

[81] Id.

[82] D’après Avoth 5, 21 : « A l’âge de quarante ans – la Binah ».

[83]Dans l’enseignement juif, les nombres quarante ou quatre cents, synonymes de processus évolutif, indiquent toujours un développement au cours duquel une situation donnée n’est plus ce qu’elle était antérieurement. Ainsi, le déluge persista pendant quarante jours et quarante nuits (Genèse 7, 12), Moïse reçut les Tables de la Loi au bout de quarante jours et quarante nuits (Exode 24, 18), Dieu fit cheminer le peuple d’Israël dans le désert pendant quarante ans Nombres (14, 33), durées qui toutes annoncent une nécessaire mutation.

[84] Isaïe 65, 17.

[85] ‘Haguiga 2a.

[86] Soucca 28a.

[87] Id. 28b

[88] Rachi id.

[89] Rachi id. 2b.

[90] Soucca 42a.

[91] ‘Haguiga 2a.

[92] Cantique des Cantiques 7, 2.

[93] Soucca 49 b.

[94] Pesikta deRav Kahana, annexes alinéa 2 ; voir aussi Baba Batra 75a.

[95] Zohar III 255b ; e.a.

[96] Soucca 2b. Reine d’Adiabène au 1er siècle, Hélène, convertit au judaïsme, fixa sa résidence à Jérusalem.

[97] D’après Psaumes 113, 9.

[98] Yebamoth 62b.

[99] Job 5, 24.


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